Le 7 janvier prochain marquera le dixième anniversaire de l’attentat contre Charlie Hebdo, première tragédie d’une année 2015 qui allait profondément marquer la France. Une décennie plus tard, l’héritage de ce moment historique soulève des questions cruciales sur la liberté d’expression et les valeurs de la République.
L’hebdomadaire, qui publie pour l’occasion un numéro spécial de 32 pages avec des caricatures sur Dieu issues d’un concours international, continue son combat pour la liberté d’expression. Loin des records de 2015, où le journal avait atteint huit millions d’exemplaires après l’attentat, Charlie Hebdo poursuit sa route avec 30 000 abonnés, désormais installé dans des locaux secrets et ultra-protégés.
Mais au-delà des chiffres, c’est la question de l’héritage de « l’esprit Charlie » qui interpelle. La gauche, historiquement attachée à la laïcité et à la liberté d’expression, se trouve aujourd’hui divisée sur son rapport au journal satirique. D’un côté, des figures comme Fabien Roussel réaffirment leur attachement aux valeurs défendues par Charlie Hebdo. De l’autre, une partie de la gauche, notamment La France Insoumise, prend ses distances avec l’hebdomadaire, accusé de dériver vers l’islamophobie.
Cette fracture illustre un malaise plus profond dans le rapport de la gauche à la laïcité et au droit au blasphème. Dix ans après les manifestations historiques qui avaient rassemblé près de 4 millions de personnes en France, le « Je suis Charlie » semble avoir perdu de son universalité. Certains, comme le député socialiste Jérôme Guedj, déplorent que ces combats ne soient plus aussi présents qu’il y a dix ans à gauche.
Les commémorations officielles se dérouleront mardi en présence du président de la République et de plusieurs ministres, dans une sobriété voulue par les familles des victimes. Un moment de recueillement qui ne doit pas faire oublier que la menace terroriste reste présente, comme l’a rappelé récemment la condamnation du jihadiste Peter Cherif, impliqué dans la formation d’un des frères Kouachi.
Charlie Hebdo, né dans l’esprit libertaire de l’après Mai-68, est paradoxalement devenu une institution, symbole d’une liberté d’expression qui reste à défendre. La récente disparition de Simon Fieschi, ancien webmaster du journal grièvement blessé dans l’attentat, nous rappelle douloureusement que les cicatrices de 2015 sont encore vives.
